Issue d’un travail sur les Cerfs-volants, conçus comme graphisme en mouvement dans un espace en trois dimensions, la recherche picturale de LG a d’abord porté sur les matières textiles. Cette exploration des médiums et des possibilités techniques de la matière picturale le conduit à envisager de nouveaux supports : à partir de 1996, il aborde le bois, base idéale pour des recherches de matière, qui lui permet à la fois d’approfondir le travail du geste, et de commencer ses expériences sur les pigments et les enduits. Depuis 2005, il travaille sur de la toile libre, dont le caractère flottant crée un contraste de matière supplémentaire et ouvre une autre dynamique à l’émergence des formes.
La peinture de Laurent Golon montre le fantomatique, la matière « pâle » (Paysages pâles). Elle « révèle », comme le négatif photographique ou la radiographie. Et l’on ne s’étonne pas qu’elle se soit un jour formulée humoristiquement en « enc**ant » Platon : jeu de reflets, l’ombre n’est pas trompeuse, mais fait voir les formes des choses. Remarquable coloriste, Laurent Golon décroche la couleur du trait, inverse la procédure : de la couleur naissent les formes, flottantes. Le trait s’y inscrit, et fait matière. Les formes floues qui se reconfigurent selon que l’œil fait sa mise au point dévoilent la ligne toujours incertaine des limites entre les choses. L’informe comme incertitude des choses, comme inachèvement, parce que rien n’est / pour que rien ne soit jamais figé, arrêté. L’inachevé comme forme du dynamisme. Peinture ontologique, plutôt que métaphysique, où le corps fragile et menacé (Sourires jaunes ; À mon corps défendant ; Suaires) répond par sa présence matérielle (Naissances de Vénus ; Célibataires), en résistance (Sentinelles ; Bandiera rossa). Situation de l’homme – peinture « en situation ».
Isabelle Krzywkowski